Photoreportage : Rencontres
Partie 2
Le camp de réfugiés et migrants de Calais
réalisé pour GSF
Début janvier 2016
Ce reportage est réalisé pour Gynécologie sans frontières (GSF), il sera composé d'au moins deux séries de 5 jours entre Janvier et Février 2016. Le premier propos de ce reportage est de faire un état des lieux de la situation sur place, de mettre en avant le travail réalisé par les sages-femmes et gynécologues de GSF. En effet leur travail consiste à surveiller les femmes enceintes, à détecter des violences éventuelles et à traiter des MST.
Comprendre et appréhender le travail et la cohésion nécessaire entre les ONG, associations et élus locaux sur place est primodiale. Pour cela, en plus d'un long travail d'intégration sur le terrain, j'ai eu la chance d'assister à de nombreuses réunions en mairie et entre associations afin de mieux comprendre le contexte politique et associatif sur place.
Le second propos et non le moindre sera de s'intégrer auprès de familles et/ou groupes de réfugiés afin de comprendre "concrêtement" leurs conditions de vies vues de l'intérieur mais aussi la façon dont ils ressentent les choses. C'est alors un travail long et laborieux qui commence : des journées entières à discuter, à être assis et regarder la vie évoluer, à aider, à manger, à partager des instants de vie(s)...
Me revient alors plus fortement cette phrase de Reza :
"Avoir la patience, rester au milieu des guerres, des fêtes, des pleurs, des cris, de la vie et ne devenir qu'une caisse de résonance visuelle, tel est mon rôle." Reza
Retrouvez ici l'article précédent sur le reportage :
Dès l'entrée dans le camp les choses sont clairement exposées : We have a dream. le talus est celui de l'autoroute menant en Angleterre. On peut tout de même se demander qui a réellement écrit ce message : un groupe de migrants ou des passeurs pour qui ce passage en angleterre entretient un véritable buisness ?
Les mots "Peace" et "Résistance" sont omniprésents dans le camp, sous forme de tags, d'écriture rapides, de gravures sur bois ou juste ressenti dans le regard de ceux qu'on croise...
Deux autres mots apparaissent fortement lorsqu'on marraude dans le camp : la résilience et l'attente.
Le nombre de petits magasins d'alimentation et de gargottes où se restaurer a fortement augmenté ces derniers temps. les prix y sont classiques et le choix y est vaste, humanitaires comme migrants s'y approvisionnent. Certaines existent depuis pas mal de temps. Le panneau "bienvenue dans la ville" donnait un présentiment de ce qu'on allait y trouver, une fois dedans, on commence à comprendre qu'une nouvelle ville s'est vraiment construite... Une ville faite avec les moyens du bord.
Un nombre important de caravanes ont été données afin de permettre, aux familles en priorité, de s'installer dans de meilleures conditions que dans des tentes. La solution de la caravane permettant de donner un logement "en dur" sans pour autant construire sur une zone non constructible et donc se retrouver totalement hors la loi.
Dans 95% des cas, contrairement à ce que relaient mes collègues de la presse, les files d'attente s'organisent bien et sereinement. Ici, nous attendons pour obtenir des tickets pour de la nourriture chaude.
Dans un premier temps les points d'eau n'étaient pas protégés de la pluie ni du vent, après négociations, les associations ont obtenu l'autrisation de construire des abrits en bois autours des robinets. Ici on s'y lave les dents, les cheveux, on se rase, on récupère l'eau pour la cuisine, il y a toujours une place. Certains points sont bas et d'autres hauts : les points bas permettent de se laver les pieds et les chaussures. Des douches sont installées de part et d'autre du camp, en moyenne il est garanti une douche chaude par personne et par semaine. MSF a récement repris la responsabilité de l'entretien des douches.
Tous les enfants n'ont pas eu la chance de partir avec leur doudou ou peluches, beaucoup de dons de peluches ont été faits par la population locale.
Il n'est pas rare de croiser les hommes et les enfants dans le camp mais les femmes sont plus souvent au fond des caravanes et des tentes. Souvent les hommes les y laissent pour des raisons de sécurité: comme dans toute ville, s'il y a 90% d'hommes et 10% de femmes et enfants, les femmes se retrouvent en forte minorité et alors potentiellement en danger... Cette tendance n'est pas propre à un camp de réfugiés.
Le travail de mes collègues de GSF, en partenariat étroit avec le personnel de MDM, Salam et MSF est de trouver ces femmes, les suivre et les soigner si besoin.
Certaines femmes se recluent aussi suite à un viol. Le travail de GSF va alors consister à les trouver, les mettre en confiance, leur faire comprendre notre travail et les amener à se faire soigner aussi bien physiquement que psychologiquement.
A savoir que ce travail a été compliqué par une rumeur circulant dans le camp de calais disant que les humanitaires, avec leurs logos et gilets étaient en fait des agents-espions au service des services de l'imigration, il a alors été nécéssaire de faire passer une contre rumeur...